Nous n’en sommes qu’au début. Cela fait pourtant une quarantaine d’années que le digital a pris pied dans notre quotidien. Ce que l’on devrait vivre au cours de la prochaine décennie sera un changement de plus grande ampleur. Puissances de calcul, fermes de données et certaines technologies apparentées au digital, comme le Métaverse et l’Intelligence Artificielle en seront les principaux vecteurs. Les modes d’apprentissage des générations à venir en seront chamboulés et ré-enchanteront l’expérience apprenante. Transportons-nous quelques années plus loin…
Métaverse et Intelligence Artificielle : ils sont mon double
Un univers virtuel (méta-univers) prolongeant le monde réel voilà ce qu’est le « Métaverse ». Ma vie se prolonge. Plongé dans un espace virtuel, j’y suis représenté par mon « jumeau numérique ». Il est mon double. Ainsi, chacun d’entre-nous évoluera, dans différentes réalités en ayant le sentiment d’évoluer dans un « réel enrichi ». Mon « jumeau numérique » sera moi. Je le contrôlerai dans le virtuel et je pourrai lui déléguer des actions à réaliser en mon nom. Mon jumeau numérique pourra rencontrer, discuter, travailler, apprendre avec d’autres qui pourront, eux aussi, être des jumeaux numériques ou encore des avatars, pures créations virtuelles. Les algorithmes d’Intelligence Artificielle rendront possibles mes actions dans le « réel enrichi ». Cette intelligence, qui n’en n’est pas une, éduquée par les Humains, pour combien de temps encore, collecte des données me concernant par millions, dessinant une représentation de moi.
C’est qui ton botProf ?
Le botProf est un avatar nourrit par les algorithmes d’Intelligence Artificielle, une forme de savant virtuel, spécialisé dans des tâches d’apprentissage, jouant également le rôle de confident. Ce précepteur numérique accompagne chaque apprenant pendant sa scolarité. En permanence à ses côtés, il l’aide à faire ses devoirs et lui explique les points de connaissances compliqués. Il recueille des confidences qui ne seraient pas dites ou observées dans d’autres contextes et aide ainsi à surmonter les incidents inéluctables de la vie d’un apprenant, à identifier des situations critiques comme par exemple, le harcèlement ou toute forme de violence. Il alerte ensuite les parties prenantes concernées leur permettant d’intervenir rapidement. Le botProf connaît tellement bien l’apprenant qu’il lui apporte toujours le support approprié dans ses apprentissages. Confiant, rasséréné quant à ses savoirs, savoir-être et savoir-faire acquis, l’apprenant progresse. Le botProf ne serait pas au mieux de son efficacité s’il n’était pas éduqué, nourri d’informations, par les enseignants et par les parties prenantes de l’école. Les médiations entre tous les acteurs de l’école resteront indispensables.
Mes lunettes ont ringardisé mon smartphone
« Mettez et allumez vos lunettes » demande le professeur. « Visionnez le film sur les mobilités douces. Il se trouve dans l’espace virtuel de ce cours. Regardez-le attentivement. C’est un film interactif qui nécessitera votre intervention… » Les apprenants, chaussés de leurs lunettes, forme de nouvelle orthèse, sont plongés dans un mode
totalement immersif. La miniaturisation a permis de loger un ordinateur puissant dans une branche de lunettes légères et esthétiques. Au bout de quelques minutes, les informations apportées par les apprenants s’affichent sur les écrans de la salle. Le professeur place l’espace immersif en pause. Les apprenants reprennent position dans la classe physique et les discussions sur le sujet d’apprentissage s’engagent. On a même intégré dans les lunettes un capteur de dopamine afin de savoir si les apprentissages sont stimulants et opérants.
Heureux comme un apprenant augmenté
Les technologies du numérique s’imposent dans les environnements d’apprentissage. Elles les modifieront en profondeur, faisant de chacun de ses acteurs des individus augmentés. Si l’apprentissage augmenté sert les enseignants à réduire, voire éliminer l’échec scolaire, et si les technologies aident les parties prenantes à réduire les risques sociétaux encourus par les apprenants, alors l’expérience apprenante sera ré-enchantée. Soyons acteurs de ce réenchantement pour nous assurer de sa maîtrise, de sa mise en œuvre dans un cadre éthique solide et de nous assurer qu’il reste bien sous une « autorité » humaine.
Par Virginie Hachard, Doyenne déléguée de la faculté, campus du Havre, et Olivier Lamirault, Directeur de l’innovation et des technologies éducatives.