Management du « laisser-faire » : une étude pointe le rôle clé de la rémunération

Photo : Management du « laisser-faire » : une étude pointe le rôle clé de la rémunération

Un article à lire sur Les Échos, avec la participation de Benjamin Legros, professeur en finance à l’EM Normandie.

Zoom sur cette « guidance » réduite de la part des chefs d’équipe qui laissent leurs collaborateurs organiser leur travail et prendre eux-mêmes des décisions, tout en leur donnant les ressources et les outils pour mener leurs missions.

Dans de nombreuses entreprises, le management par incitation – ou du laisser-faire semble prendre le pas sur le management par contrainte. Le monde de l’entreprise connaît des mutations majeures, exacerbées par l’avènement du digital et de la crise du Covid-19, qui donnent lieu à de nouveaux modes de travail - dont le télétravail – et supposent de nouvelles manières de diriger les équipes . Dans ce contexte, le concept de management du « laisser-faire » connaît un regain d’intérêt dans les cercles experts.

Il peut se définir par une guidance réduite de la part des chefs d’équipe qui laissent leurs collaborateurs organiser leur travail et prendre des décisions tout en leur donnant les ressources et les outils pour mener leurs missions. D’ailleurs, une récente étude – publiée dans la revue «POMS» (intégrée au classement des 50 meilleurs journaux en gestion du « Financial Times ») – se penche sur cette notion pour réfléchir aux facteurs qui permettent de préserver la qualité du travail des collaborateurs en l’absence de contraintes managériales fortes.

« Dans de nombreuses entreprises, le management par incitation – ou du laisser-faire - semble prendre le pas sur le management par contrainte. L’approche ancienne des ressources humaines est de considérer qu’il existe une liste de tâches à accomplir et qu’une ressource humaine passive va y répondre parce qu’elle est engagée à le faire contractuellement. Le développement de l’autoentrepreneuriat et l’ubérisation de l’économie changent ce rapport et on voit émerger des agents plus indépendants, moins contrôlables, et ayant des objectifs qui peuvent différer de ceux de l’entreprise », souligne, dans une vidéo , Benjamin Legros, professeur en finance à EM Normandie et expert de la Fondation nationale pour l’enseignement de la gestion des entreprises (Fnege).

Mais comment s’assurer de la qualité du travail effectué et du service offert aux consommateurs en l’absence de contrôles ? L’étude publiée par Benjamin Legros se penche sur ce type de management dans un contexte particulier : celui où l’activité des agents se fait sur le mode « file d’attente ». L’inspiration provient des centres d’appels qui peuvent être modélisés comme des files d’attente virtuelles et ce modèle correspond à d’autres services. C’est le cas, par exemple, des urgences dans les hôpitaux - où le personnel doit prendre en charge des patients arrivant aléatoirement du fait d’accident.

« Le résultat principal mis en exergue est qu’il est possible d’atteindre les mêmes objectifs avec des incitations qu’avec la contrainte. Ce résultat justifie qu’il est possible de mettre en place un management sans contrôle », poursuit Benjamin Legros. Toutefois, l’étude suggère que l’absence d’une relation engageante de subordination entre l’employeur et l’agent doit en être compensée par une rémunération plus élevée pour les agents afin de maintenir une qualité de service.

Si le modèle de la file d’attente ne s’applique pas à tous les contextes en entreprise, l’étude permet néanmoins de réaffirmer l’importance de réfléchir à la manière dont on rémunère et, plus généralement, dont on valorise les efforts des collaborateurs dans un modèle de management fondé sur le « laisser-faire » pour permettre à tous de fournir un travail de qualité. « La rémunération est l’un des éléments essentiels d’un management plus incitatif, sans contrôle direct, permettant de valoriser la qualité de service, de prioriser les tâches à réaliser, d’inciter à la disponibilité sur certains créneaux horaires, et d’inciter à rester disponible même si aucune tâche urgente n’est en attente », conclut Benjamin Legros.

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