Dans quelle mesure une appellation géographique est-elle gage de qualité ? Le cas du whisky écossais

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À l’instar du vin, le whisky écossais est soumis à plusieurs réglementations qui définissent notamment cinq appellations géographiques distinctes : Campbeltown, Highland, Islay, Lowland, et Speyside. Chacune de ces régions est réputée pour produire des styles de whisky spécifiques, définissant ainsi pour chacune d’elles une identité de terroir.

Avec Bruno Pecchioli (ICN-Artem Business School), nous avons étudié la valorisation de la réputation collective de ces appellations géographiques à partir de l’analyse de plus de 80 000 ventes aux enchères de bouteilles de Scotch single malt. Nos travaux, publiés dans Economic Modelling, indiquent que les consommateurs valorisent l’origine géographique du whisky, et ce même après avoir pris en compte d’autres variables étudiées dans de précédentes recherches (âge du whisky, titrage alcoolique, distillerie, etc.). En l’occurrence, les prix des whiskies de l’appellation Islay sont plus élevés que ceux des autres appellations, toutes choses égales par ailleurs.

En certifiant l’origine du produit, une appellation géographique permet au producteur de signaler à ses consommateurs un niveau de qualité censé dépendre des caractéristiques géographiques du territoire de production ainsi que du respect de certaines règles de production. Les appellations permettent ainsi aux producteurs de différencier leurs produits et pratiquer des prix plus élevés.

Dans l’industrie française du vin, les appellations d’origine contrôlée (AOC) imposent aux producteurs-récoltants de cultiver des variétés de raisin particulières sur le terroir de l’appellation et garantissent que les raisins ont été cultivés sur ce territoire. Les AOC permettent ainsi de différencier les vins en termes de caractéristiques organoleptiques, du fait des propriétés inhérentes au terroir (sol, climat, population microbienne) et de celles des variétés de raisin utilisées.

Concernant le whisky écossais, la réglementation stipule que l’unique condition pour pouvoir utiliser une appellation géographique est de distiller et vieillir le whisky sur le territoire correspondant. En revanche, il n’existe aucune règle concernant le type de céréales autorisé, l’origine géographique des céréales, ou encore des tonneaux, et il est fréquent que les distilleries importent ces intrants. Dès lors, on peut légitimement s’interroger sur l’impact de la géographie du territoire écossais sur la qualité des whiskies et sur le bien-fondé des appellations géographiques.

Nos recherches permettent déjà de montrer que les consommateurs peuvent accorder une valeur plus élevée à certaines appellations même lorsque celles-ci ne permettent finalement pas de différencier la qualité des produits. Au-delà de ce constat, nos résultats invitent à s’interroger sur le contenu informationnel des appellations géographiques et sur leur lisibilité.

Ces interrogations sont légitimes tant pour le secteur du whisky que pour d’autres produits bénéficiant de labels de qualité liant la qualité du produit aux caractéristiques de son territoire de production (vin, fromage, viande, etc.). En l’occurrence, nos travaux permettent de déduire que des producteurs peuvent bénéficier de la réputation d’une appellation même lorsque celle-ci fournit une information limitée sur la qualité du produit. En montrant que les consommateurs peuvent être sensibles à des signaux de qualité au contenu informationnel limité, nos travaux corroborent d’autres recherches appelant à réduire le niveau de complexité de certains systèmes d’appellations.

Auteur(s)
  • Photo :

    David Moroz Professeur Associé en économie - Responsable de la recherche partenariale

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