Lors de la pandémie de Covid-19, beaucoup ont pris conscience du rôle essentiel des prestataires de services en entreprise – qu’il s’agisse des agents d’accueil, de sécurité, de propreté, de maintenance ou de restauration – car sans leur concours, les entreprises reconnues « vitales pour la France » telles que les centrales nucléaires, les Ministères, les hôpitaux, les sites de production, ou encore les Ehpad, n’auraient pu fonctionner. Au plus fort de la crise, les entreprises clientes des prestataires ont été nombreuses à déclarer vouloir désormais payer “le juste prix” et plus nécessairement choisir le prix le plus bas. Qu’en est-il finalement, maintenant que la pandémie parait maîtrisée ? Eléments de réponse avec un zoom sur le marché de l’accueil.
Un malheureux status quo
Pour la réalisation d’une étude de marché du secteur de l’Accueil, à découvrir bientôt sur Facilities (https://www.facilities.fr), je me suis entretenue avec plusieurs dirigeants et cadres supérieurs d’entreprises leaders dans ce domaine. De nos échanges, il ressort que les déclarations de bonne intention relatives au prix d’achat des prestations n’ont pas été suivies d’effet, mis à part chez quelques clients vertueux. Ce point est regrettable à plusieurs égards, j’y expose ici les principaux.
Le principe d’externalisation, c’est quoi ?
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est important de rappeler ce qu’est l’externalisation : Une entreprise (privée ou publique) peut choisir de faire faire par une autre entreprise les activités dont elle ne souhaite plus se charger en interne. Il s’agit généralement d’activités qu’elle estime périphériques à son cœur de métier. Cette pratique a émergé dans les années 1970 pour devenir extrêmement courante aujourd’hui.
Une entreprise opte pour l’externalisation pour accroitre ses chances de survie en cas de difficultés financières. En effet, en externalisant, l’entreprise s’engage sur un contrat commercial assez facile à rompre et ainsi elle n’alourdit pas sa masse salariale. Aujourd’hui, il est très rare de voir des hôtesses d’accueil ou du personnel d’entretien véritablement salariés de l’entreprise dans laquelle ils œuvrent quotidiennement, généralement il s’agit de prestataires.
Le sort des prestataires
Les prestataires travaillent donc au sein d’une entreprise-cliente qui paie pour une prestation clé-en-main et qui n’a à se soucier de rien de plus : elle énonce juste son besoin, choisit une gamme de prestation, mais ne gère pas le recrutement ni le remplacement des prestataires qui travaillent chez elle. Pas plus qu’elle ne définit les procédures à suivre ni les tâches à réaliser. Aujourd’hui, les prestataires de service représentent plusieurs millions de travailleurs en France. Ces derniers sont généralement en temps partiel (les contrats en temps complet sont les plus rares), et payés au smic sur plusieurs échelons de leur convention collective. C’est donc un emploi peu attractif, peu valorisant socialement, et les perspectives d’évolution au siège de leur propre employeur sont très maigres.
Pourquoi est-ce aux entreprises-clientes de fournir un effort ?
Avec le développement massif de l’externalisation, les entreprises-prestataires sont prises dans ce qu’on appelle « un océan rouge » en Stratégie : beaucoup de concurrents dans un domaine peu innovant où il est extrêmement difficile de se démarquer sinon par un prix toujours plus bas. Par ailleurs, environ 85% des coûts de ces entreprises sont de la masse salariale (puisqu’elles emploient massivement pour détacher chez la clientèle), de fait leur marge de manœuvre est extrêmement réduite. Pourtant, toutes ces entreprises-prestataires sont désireuses de faire monter en gamme leurs prestations, autant que de proposer des innovations.
La grande tendance aujourd’hui est à l’Hospitality Management : davantage de services tournés vers les employés des entreprises-clientes pour « réenchanter les espaces de travail » et faire en sorte que l’on soit heureux de retourner au bureau. Toutefois, pour mettre en place cette nouvelle approche, il faut recruter des individus ayant des compétences supérieures, or il parait peu concevable d’attirer et de fidéliser ce genre de profils avec un salaire au smic. Il revient donc aux entreprises-clientes de reconnaitre que si elles souhaitent des prestations de plus haute gamme et des prestataires moins volatils (et davantage satisfaits !) il faut payer le juste prix de la qualité.