Delphine Minchella, professeur assistant en théorie des organisations à l’EM Normandie, enseigne le management de projet depuis plusieurs années maintenant. Dans ses cours, elle prenait l’habitude d’illustrer ses propos par des cas d’entreprise. Puis, l’année dernière, en lisant biographie de Louis XVI, Delphine Minchella a réalisé que la fuite de la famille royale en 1791 et son arrestation à Varennes constituait, en soi, un cas riche d’enseignements.
Dans cet événement se concentrent une logistique complexe, une multitude de parties prenantes et des enjeux nationaux, voire internationaux. On y observe un fatal manque de leadership, et une coordination défaillante, jusqu’à la perte même de l’objectif du projet.
Face à des étudiants en école de commerce (public issu majoritairement de formations économiques ou scientifiques), l’exercice pouvait s’avérer risqué. Contre toute attente, les étudiants se sont très rapidement prêtés au jeu de cette approche différente, et par ailleurs exigeante. Pour bien comprendre les problèmes de gestion et de management inhérents à cet exemple, il était essentiel qu’ils se plongent dans son contexte historique en premier lieu.
Au fil des séances, les étudiants se sont rendu compte que la littérature contemporaine en sciences de gestion leur apportait des concepts et des appuis pertinents pour analyser l’échec de cette fuite. Cette parenthèse culturelle a rafraîchi les mémoires sur la période révolutionnaire, et suscité le désir de quelques-uns d’en approfondir l’étude.
Si les recherches sur les organisations peuvent s’alimenter de faits historiques, de littérature ou encore d’autres formes de créations artistiques, la mobilisation de ce genre de sources semble moins évidente dans une salle de cours en management. Elle permet pourtant de sortir des sentiers battus, et d’ouvrir de nouvelles perspectives sur les champs d’études traditionnels.
L’examen de la fuite de Louis XVI a permis de rebondir vers des théories issues des recherches actuelles sur les organisations. Mais on peut aussi inverser le procédé et emprunter des concepts venant des humanités pour s’en servir comme base de réflexion afin d’appréhender différemment le management.