La mixité des métiers : un objectif encore lointain

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Alors que femmes et hommes en France sont aujourd’hui à parts quasiment égales dans la population active, peu de métiers sont mixtes : seuls 18 % des salariés exercent un métier présentant une répartition femmes-hommes équilibrée (située entre 40 et 60%). En 2020, 70 % des femmes exercent des métiers « féminisés » (c’est-à-dire dans lesquels on trouve au moins 65 % de femmes). Il s’agit des métiers du soin et de la santé (aides-soignantes), des services aux particuliers (assistantes maternelles, aides ménagères) et des postes administratifs (secrétaires, employés administratifs, comptabilité). De leur côté, 64 % des hommes exercent des métiers « masculinisés » (dans lesquels on trouve au moins 65 % d’hommes) : des métiers du bâtiment et des travaux publics, du transport (routier, coursier), de l’industrie ou de l’informatique en particulier.

Dans les métiers d’exécution, la segmentation des femmes et des hommes est encore plus notoire : les emplois d’ouvriers sont exercés à 80 % par des hommes et ceux d’employés à 75 % par des femmes (Source : Ministère du Travail – © Observatoire des inégalités, 2020). Et même si la mixité s’accroit à l’intérieur de certains métiers (plus de femmes cadres dans la banque et l’assurance par exemple), les progrès restent lents.

Le poids des stéréotypes de genre et la difficulté à transgresser les rôles sexués

Dans la plupart des cas, cette ségrégation professionnelle résulte de traditions culturelles profondément ancrées. Les analyses les plus récentes mettent au premier plan l’influence des stéréotypes de genre. Ces stéréotypes assignent aux femmes et aux hommes des rôles sociaux différenciés (par exemple, les hommes seraient autoritaires et charismatiques, les femmes collaboratives et à l’écoute).

Ces croyances nous influencent toutes et tous, et entretiennent la conviction que certaines activités sont inadaptées aux Femmes et aux Hommes ; elles nous enferment souvent dans des catégories de métiers : les hommes dans les métiers techniques et les femmes dans les métiers du soin. Sans le savoir, à cause de ces représentations, nous réduisons le champ des possibles professionnels aussi bien pour les femmes que pour les hommes.

Encore aujourd’hui, nous constatons la persistance de parcours scolaires très différenciés entre filles et garçons. L’éducation nationale peine à faire évoluer la mixité dans les formations initiales. A cet égard, le poids des représentations sexuées parait particulièrement lourd dans les choix faits en fin de collège, à l’âge où les jeunes sont en pleine construction identitaire. Les enquêtes auprès des jeunes générations montrent un affaiblissement relatif des stéréotypes de sexe, mais qui se traduit encore peu sur les choix d’orientation.

Le rôle des Grandes écoles

Dans les écoles de management où règne la parité, on constate également que les étudiants et étudiantes ne s’orientent pas vers les mêmes spécialités. Les premiers sont nombreux à se diriger vers la finance et ses carrières rémunératrices, les secondes vers le secteur de la communication, du marketing ou les ressources humaines. Derrière la parité de façade se reproduit souvent une ségrégation des filières.

L’enjeu est pourtant de taille : développer la mixité des métiers contribue à l’égalité professionnelle, puisque près d’un quart de l’écart salarial moyen entre femmes et hommes s’explique par la concentration des femmes sur des métiers moins qualifiés, qui sont aussi les moins rémunérés (IGAS, 2017).

Ré-équilibrer les métiers, c’est d’abord lutter contre les représentations stéréotypées de certains métiers et le faire le plus tôt possible dans le système éducatif. C’est aussi sensibiliser tout au long du parcours en écoles supérieures aux métiers dits féminins et masculins, mais aussi à l’entrepreneuriat, afin de les « démystifier » et donner l’envie aux un.e.s et aux autres d’aller vers ces métiers, sans apriori, sans barrière.

C’est aussi organiser des tables rondes, ateliers, forums avec des femmes et des hommes qui incarnent des rôles modèles dans ces secteurs pour pourvoir s’y identifier, et rendre attractif le métier. Il s’agit surtout de créer une culture d’égalité et de former les futurs managers aux biais inconscients qui peuvent les enfermer dans certains schémas, venant limiter leurs compétences et freiner le développement de leur plein potentiel.

Auteur(s)
  • Photo :

    Sabrina Tanquerel Professeur assistant en gestion des ressources humaines et développement personnel

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