Si les personnes récemment embauchées sont considérées comme des salariés à rendre immédiatement opérationnels au sein de l’entreprise, elles constituent également de puissants vecteurs de lutte contre l’obsolescence des compétences.
Les évolutions, qu’elles soient technologiques, environnementales ou sanitaires, remettent en cause les compétences des équipes de travail dans l’entreprise. Par exemple, l’accélération de la transformation numérique dans le secteur de l’aéronautique implique pour Airbus de faire évoluer les savoir-faire de ses « compagnons », et en particulier de ceux dont les métiers vont disparaître. Airbus, par exemple, se doit d’attirer de nouvelles compétences dans un contexte de compétition croissante en ce qui concerne certains profils. Comme son DRH le confiait aux « Echos » : « Nous devons faire face à un choc démographique, au défi de la digitalisation et à l’arrivée de nouveaux concurrents. Nous devons non seulement prévoir l’évolution des effectifs, mais aussi l’évolution des compétences, en identifiant les métiers en déclin et en transformation, et ceux qui vont émerger. Sur les deux prochaines années, un quart de nos recrutements porteront sur des compétences dites “nouvelles” dans le groupe ».
L’inertie liée à la routinisation du travail peut conduire à la déperdition des compétences. C’est ce que met en évidence un article de BBC News qui s’est intéressé à une étude portant sur le secteur audiovisuel et plus particulièrement sur les équipes de la série « Doctor Who ». Dans cette étude, les chercheurs ont montré que les épisodes introduisant de nouveaux acteurs étaient les mieux notés. Selon eux, « ces résultats sont applicables à à peu près n’importe quelle équipe dans n’importe quel cadre de travail, pas seulement aux équipes de télévision. Avoir des réseaux ouverts et poreux qui accueillent de nouvelles personnes donne le “choc” dont l’équipe a besoin pour être plus créative et produire un meilleur travail. »
Pour connaître une trajectoire de progression constante, la compétence collective de l’équipe de travail a besoin de renouvellement continu et de remises en cause. Notre propre étude, menée au sein de SNCF Réseau, montre qu’un des moyens d’assurer ce mouvement continu de régénération est la mise en place d’un dispositif d’intégration des nouveaux embauchés qui constitue alors un levier de lutte contre le risque d’obsolescence des compétences. Il s’appuie sur des formations internes spécifiques et sur la diversité des profils des nouveaux embauchés, qui intègrent l’organisation avec leur expérience passée, acquise dans d’autres contextes de travail. En effet, comme le souligne un manager de proximité de SNCF Réseau : « A un moment donné, il faut des mouvements de personnel pour que l’équipe reste sur cette ouverture d’esprit, sinon, elle ne cherche pas à évoluer plus loin. Il faut avoir des jeunes qui remettent un petit peu en question, et ça fait grandir l’équipe. Bon, c’est un intérêt d’avoir du monde, d’avoir un renouvellement, c’est plus que bénéfique. Dans une équipe, c’est très bien d’avoir des gens de différents âges. » Le profil du nouvel embauché revêt donc un rôle clé dans le processus de transfert des compétences.
Découvrez l’intégralité de l’article de Jean-François Garcia, enseignant-chercheur à l’EM Normandie pour Harvard Business Review ici.
Article co-écrit par Samuel Grandval, Nathalie Montargot et Ewan Oiry.