La question de la transmission des entreprises familiales est au cœur des enjeux entrepreneuriaux contemporains. Pourtant, si les entreprises familiales représentent près de 70 % du PIB mondial et emploient 60 % de la main-d’œuvre (CNUCED, 2021[1]), la place des femmes dans ces transmissions reste souvent marginalisée ou invisibilisée.
Une recherche menée par Nizar GHAMGUI et Sylvaine CASTELLANO a été présentée dans le cadre des Conférences Internationales Francophones en PME et Entrepreneuriat (CIFPME) 2022 et des Journées Georges Doriot 2023, deux événements majeurs dans le domaine de la recherche en entrepreneuriat et en gestion. Leur étude met en lumière les dynamiques de légitimité sociale auxquelles sont confrontées les femmes successeurs.
Entre structures sociales et dynamiques personnelles : un enjeu de légitimité
Cette étude s’appuie sur la Strong Structuration Theory (Stones, 2005) et l’analyse de cinq cas de succession menée par des femmes en France. Elle met en évidence les interactions complexes entre les structures sociales existantes et les actions stratégiques mises en place par ces femmes pour se forger une légitimité, à la fois personnelle et entrepreneuriale.
Les auteurs soulignent que la transmission d’une entreprise familiale implique deux cycles de structuration : le premier repose sur la légitimité personnelle, perçue et validée au sein du cercle familial. Le second s’attache à la légitimité entrepreneuriale, qui se construit progressivement à travers l’interaction avec les salariés, les clients et les autres parties prenantes.
Un combat quotidien pour la reconnaissance
Malgré des compétences avérées et un engagement fort, les femmes successeurs doivent souvent faire face à des attentes et à des jugements différents de ceux de leurs homologues masculins. Les salariés, les concurrents ou les clients remettent parfois en question leur capacité à diriger, nécessitant un effort supplémentaire de légitimation.
L’étude met en avant différentes stratégies adoptées par ces femmes pour renforcer leur légitimité : l’instauration de nouvelles méthodes de gestion, l’appui sur des réseaux professionnels, l’acquisition de compétences techniques et managériales spécifiques, ou encore le développement d’un leadership inclusif et participatif.
Vers une reconnaissance élargie du rôle des femmes dans l’entreprise familiale
Cette recherche souligne la nécessité de repenser les modes de transmission des entreprises familiales afin d’intégrer pleinement les femmes dans ces processus. Loin d’être une simple question de succession, il s’agit d’un véritable enjeu de reconnaissance et d’évolution des normes sociales.
La recherche de Nizar GHAMGUI et Sylvaine CASTELLANO, présenté aux CIFPME 2022 et aux Journées Georges Doriot 2023, invite ainsi à une réflexion plus large sur la place des femmes dans l’entrepreneuriat familial et les mécanismes de légitimation qui doivent accompagner ces transitions.
[1] Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement
